Trouvée morte dans son congélateur

Par Agence QMI/Marc Pigeon
Le mystère persiste, un an et demi après la découverte du corps d'Huguette Gravel-Bilodeau dans le congélateur de sa maison : on ignore toujours la cause de son décès. Pendant ce temps, le fils de la victime recevra sa sentence aujourd'hui et une chicane couve dans la famille.
5 juin 2009, 16h59. Un appel résonne à la centrale des appels de la Sûreté du Québec. Un homme affirme avoir trouvé le corps de sa mère dans le congélateur.
Arrivés sur les lieux, dans une maison du chemin Chertsey, dans la municipalité du même nom, les policiers rencontrent Laurent Bilodeau, 48 ans, qui les attend à l'extérieur.
Huguette Gravel-Bilodeau, 68 ans, repose dans le congélateur, vêtue. Le capuchon de son kangourou ainsi qu'un linge recouvrent sa tête. On dirait qu'elle y a été déposée, assise confortablement : un coussin a été placé dans son dos et un carton l'empêche de se coller la tête sur les parois.
Les versions qu'il donne aux policiers sont «très étranges» et changeantes, au point où on décide de l'arrêter à titre de suspect dans cette affaire.
Bilodeau demeurait avec sa mère. Celle-ci le craignait. Amateur d'armes à feu et d'explosifs, il possédait aussi deux chiens pitbulls qui ont attaqué la dame, quelques mois avant sa mort.
Bilodeau vit chez sa mère et depuis, la maison est un véritable bordel, où tout traîne.
Aux policiers, Bilodeau explique qu'il s'est disputé avec sa mère le 30 ou le 31 mai. Mais selon sa version, ce n'est que le 2 juin, en revenant d'une commission, qu'il a retrouvé sa mère morte dans la douche du sous-sol.
Ne sachant trop que faire, il dit l'avoir vêtue. Le corps aurait été assis dans un fauteuil du salon quelque temps, puis dans le congélateur, le 3 juin. Il n'a alerté la police que le 5 juin.
Le congélateur a été amené à la morgue, où le corps a pu subir une autopsie, après deux jours de décongélation.
Les résultats sont mystérieux : on ne peut pas vraiment déterminer la cause du décès. Le pathologiste identifie deux causes probables :
*une mort violente par compression prolongée des vaisseaux carotidiens «ce genre de décès pouvant ne pas laisser de traces décelables à l'autopsie» ;
*une «mort naturelle avec disposition du corps dans un congélateur n'est pas exclue».
Les experts concluent que la victime ne se serait pas débattue et semblent exclure un décès par asphyxie ou hypothermie.
Le problème, c'est que le corps a été congelé et décongelé, ce qui l'a endommagé au point de rendre difficile l'identification de la cause du décès.
Devant ces résultats peu convaincants, aucune accusation de meurtre n'a été déposée contre Bilodeau, qui fait plutôt face à une simple accusation d'avoir négligé de bien disposer du cadavre de sa mère. Un crime punissable par un maximum de cinq ans de détention.
Bien que les preuves manquent, sa famille voit les choses d'un autre angle : sa soeur et son beau-frère en veulent à Laurent Bilodeau pour ne pas avoir agi convenablement avec le corps de la défunte.
Une tape sur les doigts
«Quand tu trouves quelqu'un inconscient, tu appelles le 911, tu attends pas trois jours pour appeler la police et tu caches pas le corps dans un congélateur. Il va sûrement finir avec juste une tape sur les doigts», ironise Robert Rougeau, beaufrère de l'accusé.
Les membres de la famille remuent ciel et terre et pointe du doigt le travail de la police pour expliquer pourquoi Bilodeau ne fait pas face à de plus graves accusations.
Par ailleurs, les procédures successorales s'annoncent difficiles, puisque les deux seuls enfants de la défunte ne s'entendent pas. Et comme Laurent Bilodeau semble avoir droit à l'héritage, selon sa soeur, la succession est loin d'être réglée.
Bilodeau a comparu ce matin, mais la sentence a été reportée au 23 amrs prochain. La poursuite réclame 18 mois de détention ferme, alors que la défense suggérait une peine dans la collectivité.
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Des surprises dans la maison
Lorsqu'ils ont eu la permission d'entrer dans la maison de la victime, les membres de la famille ont eu tout un choc, en réalisant les conditions dans lesquelles la pauvre femme vivait.
Déjà, depuis plusieurs années, les relations entre Laurent, sa soeur et son beau-frère n'étaient pas au beau fixe. Ceux-ci n'étaient pas allés dans la maison familiale depuis quelques années, soit depuis que Laurent y habitait.
Mais ce qu'ils ont découvert dans la maison depuis la mort de Mme Gravel-Bilodeau n'a rien pour améliorer les choses.
D'abord, il y régnait un véritable fouillis. Mais ensuite, la fille de la victime et le conjoint de celle-ci, Robert Rougeau, ont découvert un attirail pour le moins inusité.
Des documents indiquaient comment fabriquer des explosifs, avec une substance poudreuse, un liquide et un bol de verre. Un peu plus loin, sur un poêle à deux ronds, se trouvait un bol vitré, avec un liquide et une substance au fond.
Fabriquer une bombe
«Il était en train de fabriquer une bombe dans la maison !», décrit son beau-frère, Robert Rougeau.
Des munitions de fort calibre, des chargeurs et des menottes ont aussi été trouvés.
On a d'ailleurs accusé Bilodeau de possession d'une arme prohibée ou à autorisation restreinte.
Un document expliquant comment blinder une voiture à l'épreuve des balles et comment y confectionner une cachette pour y placer une arme a aussi été trouvé. Il avait d'ailleurs fait l'achat d'une ancienne voiture de police, qui était stationnée sur le terrain arrière.
«On a même découvert un squelette de chien !», dénonce M. Rougeau, photos à l'appui.
Des documents montrant combien la victime était malheureuse aux mains d'un fils envahissant et menaçant ont été trouvés. Notamment, une liste en 11 points de tous les «obstacles» à son bonheur (voir tableau ci-bas).
La famille affirme aussi que des voleurs s'introduisent dans la maison de leur mère, sachant probablement que personne n'y ha-bite.
Depuis la mort de Mme Gravel-Bilodeau, plusieurs outils, une souffleuse et même une thermopompe ont été volés, selon eux.
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