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Un organisme fait le pari d'aider les femmes à intégrer des métiers non traditionnels

durée 11h44
9 août 2025
La Presse Canadienne, 2025
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Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2025

MONTRÉAL — Devenir ingénieure, assembleuse ou informaticienne est un rêve de bien des femmes, mais elles peinent encore à se frayer une voie dans ces métiers non traditionnels. Un organisme montréalais a fait le pari de les aider à intégrer ces emplois et mettre fin aux préjugés qui les entourent.

Maimouna Sangare en sait quelque chose. Passionnée de mathématiques et de physique, elle a fait le choix de faire carrière en génie civil.

«Ce qui m'a vraiment attirée, c'est le fait de pouvoir avoir un réel impact dans la vie des gens, tout ce qui touche le développement de notre ville et de notre environnement immédiat», raconte-t-elle.

Avec son baccalauréat en génie civil de l'Université d'Ottawa en poche en mai 2024, elle s'est lancée ni une ni deux à la recherche d'un emploi dans ce domaine au Québec, mais s'est rapidement butée à un mur.

«J'ai commencé à postuler, mais la réalité m'a rattrapée. J'ai postulé pendant des mois et des mois, mais sans aucune suite, explique-t-elle. C'était assez décourageant et je ne voyais pas nécessairement le bout du tunnel.»

Cela a été un véritable «choc» pour la jeune femme, qui avait de bons résultats scolaires et avait même obtenu une bourse d'excellence.

Comme elle, plusieurs femmes ont fait le choix de travailler dans un métier non traditionnel, c'est-à-dire un emploi qui est occupé par 33 % ou moins des femmes.

Au Québec, seuls 19 % des femmes exercent un métier que l'on dit majoritairement masculin, selon le rapport 2024-2025 du Centre des femmes de Montréal publié en juillet.

Selon Louise Villeneuve, conseillère en emploi dans cet organisme montréalais depuis près de 13 ans, plusieurs barrières existent encore pour les femmes dans ces professions.

Les préjugés et stéréotypes coriaces, les disparités salariales, le climat parfois hostile, le manque de conciliation famille-travail ou encore la difficulté à accéder à ces réseaux sont quelques-uns de ces facteurs.

Dans le génie civil, par exemple, Mme Sangare croit que la peur de l'inconnu peut être une barrière.

«C'est un domaine majoritairement dans la construction, et les gens ont un peu cette tendance à avoir une image préconçue et, quand tu vois quelque chose de différent, tu as des doutes», avance-t-elle.

Pour Mme Villeneuve, il est clair que les femmes ont encore à gagner en termes d'égalité et d'équité.

«Il y a des possibilités d'emploi et elles sont talentueuses, soutient-elle. J'aimerais vraiment qu'elles aient accès à leur plein potentiel».

Prendre sa place

Louise Villeneuve a l'habitude d'encadrer les femmes dans leur recherche d'emploi dans les métiers non traditionnels avec le programme Action-Réaction.

Elle vient ainsi en aide aux femmes qui ont une formation ou de l'expérience dans ces domaines majoritairement masculins avec ce programme qui offre un coaching personnalisé et de groupe.

«On les invite à mettre les deux mains sur le volant et à sortir de l'isolement, à sortir du marché du travail où l'on voit juste des offres d'emploi», souligne-t-elle.

En plus de travailler la proactivité, la conseillère les oriente vers le marché caché, qui représente une part importante des embauches dans ces métiers non traditionnels.

Son objectif est que la dizaine de femmes qui prennent part à ces groupes repartent des 11 semaines de programme avec un emploi ou un stage en poche.

Et la stratégie semble payante, comme peut en témoigner Maimouna Sangare, qui est désormais candidate à la profession d'ingénieur après avoir trouvé un emploi lors du dernier jour du programme.

«Ce genre de programme, ça t'aide à reprendre confiance en toi parce qu'après énormément de rejet, tu ne ressens pas nécessairement que tu as toutes les capacités pour ce genre de domaine», indique-t-elle.

D'après elle, le programme Action-Réaction lui a permis de trouver un espace d'écoute et de respect pour aller «au-delà des outils techniques qu'on donne en général à une personne qui est en recherche d'emploi».

«Être dans un environnement avec d'autres femmes qui sont dans la même situation que toi dans des domaines assez similaires au tien, c'est vraiment quelque chose qui motive énormément», juge-t-elle.

Dans la dernière année, ce sont 76 femmes qui ont pris part à ce programme offert par le Centre des femmes de Montréal, dont le service d'employabilité est financé par des subventions du ministère du Travail et de Services Québec.

Comme Mme Sangare, plusieurs participantes ont trouvé un poste dans un secteur majoritairement masculin en 2024-2025. Parmi elles, on retrouve une assembleuse, une estimatrice en mécanique du bâtiment, une analyste financière ou encore une designer graphique.

Si elle a parfois noté certaines améliorations dans des métiers non traditionnels, Mme Villeneuve croit qu'il reste encore du travail à faire pour améliorer leur accessibilité.

Quoi qu'il en soit, Mme Sangare affirme que le plus important est de ne pas abandonner ses rêves.

«Il faut vraiment se battre et ce n'est pas parce que c'est majoritairement masculin qu'une femme ne va pas tout autant exceller qu'un homme», soutient-elle.

Audrey Sanikopoulos, La Presse Canadienne