Premières nations: les négociations sur la protection de l'enfance devront reprendre


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Par La Presse Canadienne, 2025
OTTAWA — Le Tribunal canadien des droits de la personne ordonne aux parties impliquées dans une affaire de protection de l'enfance qui dure depuis dix ans de collaborer – ou de travailler séparément – pour réformer le système et empêcher Ottawa de poursuivre la discrimination envers les enfants des Premières Nations.
L'ordonnance survient neuf ans après que le Tribunal a conclu que le gouvernement fédéral avait fait preuve de discrimination envers les enfants des Premières Nations en sous-finançant le système de protection de l'enfance dans les réserves, à la suite d'une plainte conjointe en matière de droits de la personne déposée en 2007 par l'Assemblée des Premières Nations (APN) et la Société de soutien à l'enfance et à la famille des Premières Nations du Canada.
Le Tribunal a déclaré que le sous-financement d'Ottawa était discriminatoire, car il signifiait que les enfants vivant dans les réserves recevaient moins de services que ceux vivant hors réserve. Il a chargé le Canada de conclure une entente avec les Premières Nations pour réformer le système et d'indemniser les enfants arrachés à leur famille et placés en famille d'accueil.
Mais au cours des neuf années qui ont suivi cette décision, les progrès vers une entente ont rencontré plusieurs obstacles, aboutissant à un accord de 47,8 milliards $ rejeté à deux reprises par les Premières Nations l'an dernier. Ottawa a soutenu au Tribunal en mai que les demandes qui lui étaient soumises étaient «déraisonnables».
Dans une ordonnance publiée le 20 août, le Tribunal a déclaré que l'impasse ne pouvait perdurer.
«Le Canada a reçu l'ordre de mener à bien une réforme à long terme. Le Canada peut accepter de négocier ou non, mais il ne peut se contenter d'attendre et de laisser le temps passer», a écrit le Tribunal.
Selon la décision, si Ottawa refuse de reprendre les négociations, l'APN, la Société de soutien à l'enfance et à la famille des Premières Nations et la Commission nationale des chefs pour les enfants nouvellement créée, ainsi que leurs partenaires des Premières Nations, pourront présenter au Tribunal leur propre plan de réforme fondé sur des données probantes.
Cindy Blackstock, directrice de la Société de soutien à l'enfance et à la famille des Premières Nations, a salué la décision.
«(Ottawa) peut se conformer aux ordonnances du Tribunal, économiser l'argent des Canadiens et faire ce qu'il faut pour les enfants. Il leur suffit de prendre cette décision, a-t-elle dit en entrevue. S'ils ne prennent pas cette décision, je pense qu'ils subiront de graves conséquences, tant sur le plan financier et juridique que moral.»
Mme Blackstock affirme depuis plus d'un an qu'Ottawa est responsable de l'interruption des négociations, préférant se concentrer sur une entente distincte conclue avec les Premières Nations de l'Ontario, en attente d'approbation.
Le Tribunal a statué que, bien qu'Ottawa ait conclu une entente avec les Premières Nations de l'Ontario, cette entente ne devrait pas être imposée au reste du pays ni servir de référence pour les négociations futures.
Le Tribunal canadien des droits de la personne a estimé que tout plan proposé doit avoir des effets durables et être financé adéquatement pour les générations présentes et futures, intégrer des perspectives diverses, être fondé sur des données probantes, être culturellement adapté et garantir sa conformité avec la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.
«Cela montre clairement que le Canada doit s'asseoir à la table des négociations de bonne foi et discuter de la manière dont il compte mettre fin à la discrimination et empêcher qu'elle ne se reproduise, en s'appuyant sur des données probantes, en visant l'excellence et en ne dépendant pas des accords conclus par le Canada dans le cadre de l'accord final avec l'Ontario», a déclaré M. Blackstock au sujet du décret.
La Presse canadienne a contacté le bureau de la ministre des Services aux Autochtones, Mandy Gull-Masty, pour obtenir une déclaration, mais n'a pas encore reçu de réponse.
Alessia Passafiume, La Presse Canadienne