Pour de nombreux Canadiens, les collations sont devenues les nouveaux repas

Pour de nombreux Canadiens, les collations sont devenues les nouveaux repas, remplaçant les dîners et les soupers traditionnels, car les gens recherchent de plus en plus la praticité à petit prix. Les fabricants de produits alimentaires surveillent attentivement cette tendance.

«Le grignotage» est devenu un phénomène important, selon Jo-Ann McArthur, présidente de Nourish Food Marketing, faisant référence au fait que les consommateurs combinent plusieurs collations pour composer un repas, comme du fromage, des fruits et des noix.

«Ils délaissent le sandwich au profit d'une multitude d'aliments différents», précise-t-elle.

Un récent sondage de Restaurants Canada révèle qu’environ 65 % des Canadiens remplacent un repas traditionnel par une collation au moins une fois par mois. Ce phénomène est particulièrement marqué chez les jeunes générations, comme les millénariaux et la génération Z.

Ce changement s'explique en partie par un mode de vie hybride post-pandémie, explique Sally Lyons Wyatt, vice-présidente exécutive mondiale et conseillère principale en études de marché pour les biens de consommation et la restauration chez Circana.

Il est plus facile de prendre une collation lorsqu'on travaille à domicile que de passer du temps dans la cuisine à préparer un repas. De même, une collation est moins coûteuse qu'un repas complet au bureau.

«L'accessibilité des collations permet aux consommateurs d'obtenir ce qu'ils veulent, quand ils le veulent et pour n'importe quelle occasion», affirme Mme Wyatt.

La définition même de «collation» a également évolué, souligne Jenny Thompson, vice-présidente, stratégie et analyse de marché chez Ipsos Canada, une entreprise qui étudie les tendances de consommation dans le secteur de l'alimentation et des boissons. Alors que certains consommateurs privilégient des portions plus petites tout au long de la journée, ils recherchent des solutions de rechange aux classiques bretzels, chips et biscuits.

«On observe une évolution vers l'intégration de ce que l'on considère comme des en-cas non traditionnels», indique-t-elle.

Par exemple, certains considèrent un bol de céréales ou une pointe de pizza comme une collation, rapporte-t-elle. D'autres peuvent remplacer un repas par une boisson protéinée et la qualifier de collation.

On constate également l'essor des collations «meilleures pour la santé» ou «saines », c'est-à-dire celles qui sont moins caloriques et plus nutritives.

Les premières conclusions d'une étude d’Ipsos en prévision de 2026 montrent que les collations saines représentent le juste équilibre entre santé et plaisir, permettant aux consommateurs de satisfaire leurs envies tout en respectant leurs objectifs de bien-être.

«Une collation seulement pratique ou savoureuse n'est pas vraiment réussie. Elle doit aussi être saine et faite avec des ingrédients simples. Il y a tout un ensemble d'autres besoins émotionnels et fonctionnels à satisfaire», affirme Mme Thompson.

La préférence pour des collations plus saines et des portions plus petites est en partie due à la popularité croissante des médicaments amaigrissants, comme Ozempic. Pour de nombreux utilisateurs, ces médicaments s'avèrent efficaces pour perdre du poids en diminuant l'appétit et en augmentant la sensation de satiété.

Mme McArthur affirme que de nombreuses personnes prenant des médicaments amaigrissants se sont mises à grignoter, car elles recherchent des portions plus petites avec la valeur nutritionnelle la plus élevée possible.

«En gros, leurs repas sont devenus des collations», dit-elle.

Les grands fabricants s'adaptent

Parallèlement, l'évolution des goûts des consommateurs a poussé de nombreux fabricants traditionnels à explorer de nouvelles stratégies.

L'entreprise d'emballage de viande Maple Leaf Foods a lancé des bâtonnets de viande à emporter appelés Mighty Protein afin de tirer parti de la tendance.

L'entreprise de soupes en conserve Campbell's, propriétaire des biscuits Goldfish, des chips Cape Cod et d'autres marques, a constaté un ralentissement de ses ventes de collations au cours du dernier trimestre, les consommateurs se tournant vers des options plus saines.

Le président-directeur général, Mick J. Beekhuizen, a déclaré aux analystes lors d'une conférence téléphonique en septembre que Campbell's est consciente de l'évolution des habitudes de grignotage et qu'elle travaille à ajouter de nouvelles saveurs et à attirer une clientèle soucieuse de sa santé et de son bien-être.

Certaines grandes entreprises ont su s'adapter rapidement. PepsiCo, propriétaire de Frito-Lay, est devenue un chef de file du marché des collations saines, notamment en acquérant des entreprises plus petites et en proposant des versions plus saines de ses produits emblématiques, comme les Doritos et les Cheetos.

Des entreprises comme PepsiCo privilégient également les emballages multiples avec des portions individuelles plus petites.

Selon Mme Wyatt, cette tendance à proposer des collations plus petites n'est pas motivée par la réduction des formats, mais plutôt par les attentes des consommateurs, soit des portions plus petites et une plus grande variété de saveurs. Elle croit que cette tendance devrait se maintenir.

Un rapport de Statistique Canada a démontré que le regain de popularité des collations à emporter après la pandémie a incité les fabricants à proposer des portions plus petites. L'agence prévoit une croissance de 6,4 % pour ce secteur entre 2023 et 2028.

«Le grignotage a encore de beaux jours devant lui, car les consommateurs apprécient la diversité et la variété des produits proposés», soutient Mme Wyatt.

Ritika Dubey, La Presse Canadienne