Les provinces «détiennent la clé» pour relancer la construction résidentielle


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Par La Presse Canadienne, 2024
OTTAWA — Alors que le gouvernement fédéral et les villes canadiennes progressent dans l’expansion de l’offre de logements, les provinces doivent encore prendre au sérieux la construction de logements de qualité, selon un nouveau rapport publié jeudi.
Aucune province n’a obtenu une note supérieure à C+ dans le rapport du Groupe de travail pour l’habitation et le climat, un organisme non gouvernemental créé en 2023 avec le soutien du Fonds pour l'économie propre, un organisme philanthropique.
Le «bulletin» du groupe de travail a évalué les gouvernements en fonction de leurs politiques de construction de logements rapides et durables.
Il a attribué au gouvernement fédéral la note la plus élevée au pays, un B, tandis que l’Alberta se classe au bas de la liste avec un D+. Les autres provinces se situaient dans la fourchette du C.
Mike Moffatt, auteur du rapport et directeur fondateur de l'initiative Missing Middle à l'Université d'Ottawa, a suggéré que les provinces ont jusqu'à présent évité d'être «examinées» pour leur rôle dans la perpétuation de la crise du logement, tandis qu'Ottawa et les villes ont été critiquées pour leurs lourdeurs administratives et leurs coûts élevés.
«Les provinces détiennent vraiment la clé. Elles disposent du plus grand nombre de leviers politiques et, dans bien des cas, elles sont celles qui ont, en fait, le moins agi», a-t-il pointé.
Le groupe de travail est coprésidé par l'ancien maire d'Edmonton, Don Iveson, et l'ancienne ministre conservatrice du gouvernement Harper, Lisa Raitt. Le premier ministre Mark Carney était l'un des membres du groupe avant de devenir chef du Parti libéral fédéral.
Mme Raitt a écrit, dans un communiqué accompagnant le rapport, qu'«actuellement, aucun gouvernement n'en fait assez pour que ces logements soient construits».
Le groupe de travail a établi son bilan en se basant sur ses évaluations des politiques gouvernementales visant à encourager la construction de logements préfabriqués, à combler les lacunes du marché, à accroître la densité, à cartographier les zones à risque élevé et à mettre à jour les codes du bâtiment.
Le rapport a révélé une grande variabilité, même au sein des provinces. Il a montré également que la Saskatchewan et l'Ontario réussissent bien à construire loin des zones à risque élevé, mais qu'ils peinent à accroître la densité.
Le rapport a attribué à la Colombie-Britannique, au Québec et à l'Île-du-Prince-Édouard la note de C+, soit la note la plus élevée jamais obtenue par une province.
Selon M. Moffat, la note de la Colombie-Britannique a souffert du fait que, si elle encourage la densité «sur papier», la lenteur du processus d'approbation des permis et les coûts de construction élevés freinent le développement.
L'Alberta, dernière de la classe
Si l'Alberta obtient de bons résultats uniquement en ce qui concerne le rythme des mises en chantier, a-t-il ajouté, cela est principalement dû au leadership des municipalités de Calgary et d'Edmonton, et non aux politiques provinciales.
La première ministre de l'Alberta, Danielle Smith, a assuré à l'Assemblée législative provinciale en novembre que le gouvernement «n'empêchait pas le secteur privé de construire davantage de logements abordables». Elle a affirmé que l'augmentation de l'offre de logements réduirait «automatiquement» les coûts pour les Albertains.
L'auteur du rapport, Mike Moffatt, a déclaré que la position de la première ministre Smith était «correcte»: réduire les obstacles au développement est essentiel pour accroître l'offre de logements abordables, mais que ce n'était «qu'une partie de l'histoire». Il a précisé que l'Alberta doit assumer la «responsabilité» de la demande de logements qu'elle suscite grâce à sa campagne de marketing réussie visant à attirer les Ontariens dans la province.
L'Alberta doit également s'assurer que les logements sont construits de manière durable et à l'écart des feux de forêt, a rappelé M. Moffatt, et qu'elle ne peut se soustraire à sa responsabilité de combler les lacunes en matière de logements sociaux.
«Nous avons besoin des deux. Nous avons besoin d'un secteur privé fort et robuste pour fournir des logements, mais nous avons aussi besoin que le gouvernement intervienne et comble les lacunes», a-t-il insisté.
De plus, les provinces prennent du retard dans la cartographie des plaines inondables, a souligné l'auteur du rapport, et doivent assumer la responsabilité des lois provinciales qui entraînent des redevances d'aménagement plus élevées.
Il a mis en exergue le fait que le bilan se basait uniquement sur les politiques mises en œuvre et ne tenait pas compte de l'impact des projets de loi proposés, comme le projet de loi 17 de l'Ontario, qui vise à accélérer le processus d'obtention des permis et des approbations, à simplifier les redevances d'aménagement et à accélérer les projets d'infrastructure.
Le rapport indique que le Fonds pour accélérer la construction de logements du gouvernement fédéral, qui encourage les municipalités à simplifier les règles de zonage pour accélérer les travaux, a progressé, mais qu'il nécessite des outils d'application pour responsabiliser les villes après la conclusion d'accords de financement avec Ottawa.
Mike Moffatt a confié qu'il espérait utiliser le cadre du bulletin pour suivre les progrès réalisés en matière de logement à l'avenir et travailler sur des recherches distinctes pour évaluer les politiques de logement des municipalités.
Craig Lord, La Presse Canadienne