Les déficits des provinces devraient diminuer dans les années à venir


Temps de lecture :
4 minutes
Par La Presse Canadienne, 2025
OTTAWA — Face à la guerre commerciale avec les États-Unis et au ralentissement économique, les provinces canadiennes devraient toutes enregistrer des déficits budgétaires cette année. Cependant, un rapport du Conference Board du Canada prédit que ces déficits se réduiront dans les années à venir.
Le rapport publié mardi dresse le portrait des provinces qui peinent à équilibrer leurs comptes.
Peu de temps après leur sortie d'une pandémie qui a fait exploser les déficits, les provinces canadiennes sont maintenant confrontées à une guerre commerciale imminente.
La plupart des provinces ont prévu des fonds de prévoyance dans leurs budgets de cette année pour soutenir les travailleurs et les industries essentielles pendant le conflit tarifaire.
Beaucoup s'alignent également sur le gouvernement fédéral pour faire avancer d'importants projets d'infrastructure dans les années à venir, ce qui exerce une pression sur les dépenses en capital.
Alors que les provinces puisent dans leurs finances, elles se préparent également à un coup dur pour l'économie.
«Un ralentissement de l'activité économique entraîne une baisse de la création d'emplois, des dépenses, des revenus et des bénéfices des entreprises», a indiqué Richard Forbes, économiste principal au Conference Board.
«Et ce sont (…) des moteurs importants des recettes provinciales.»
Pressions démographiques
Tandis qu'Ottawa réduit le flux d'immigration, le ralentissement de la croissance démographique freine également les recettes provinciales.
De nombreuses provinces sont aussi confrontées à des pressions démographiques en raison du vieillissement de la population et du départ des baby-boomers du marché du travail, ce qui constitue un autre frein aux recettes fiscales. Le nombre croissant de retraités fait par ailleurs grimper la demande de soins de santé.
Richard Forbes a expliqué qu'avec les nouveaux plafonds d'immigration du gouvernement fédéral, la croissance démographique risque d'atteindre un seuil critique dans les années à venir. Cela limiterait l'aide que les nouveaux arrivants apporteraient au marché du travail alors que les Canadiens plus âgés quitteront le marché du travail.
Le rapport du Conference Board cite l'exemple de Terre-Neuve-et-Labrador, qui, selon lui, devrait voir sa population diminuer de 10 000 habitants au cours des cinq prochaines années. Le Québec et la majeure partie des Maritimes devraient également ressentir les effets du vieillissement de la population, selon le rapport.
L'Île-du-Prince-Édouard, quant à elle, connaît la plus forte croissance démographique de toutes les provinces ces dernières années. Une augmentation de 25 % de la population sur dix ans a contribué à réduire l'âge médian de l'Île-du-Prince-Édouard de 2,6 ans, selon le rapport.
Les prévisions du Conference Board supposent que l'économie s'est contractée au deuxième trimestre de l'année, les droits de douane et l'incertitude ayant freiné l'activité manufacturière. Le groupe de réflexion prévoit un modeste retour à la croissance pour le reste de l'année.
Réduction des dépenses
À la fin de la période de planification des provinces, le rapport du Conference Board prévoit que les gouvernements freineront leurs dépenses, ce qui devrait réduire leurs déficits d'ici la fin de la décennie.
Le gouvernement fédéral a annoncé son intention d'équilibrer le volet opérationnel de son budget au cours des trois prochaines années. M. Forbes s'attend à des réductions similaires de la part des provinces dans des domaines comme l'administration publique.
«De manière générale, nous constatons bien sûr que les provinces font preuve d'une plus grande prudence dans leurs plans de dépenses au cours des deux dernières années», a-t-il soutenu.
Certaines provinces, dont la Saskatchewan et l'Alberta, devraient renouer avec des excédents budgétaires annuels avant 2030. Le Conference Board indique que les provinces des Prairies canadiennes jouissent d'une situation financière relativement stable, notamment grâce à une population plus jeune et à une certaine protection contre les droits de douane.
Des provinces comme l'Alberta, la Saskatchewan et Terre-Neuve-et-Labrador devraient orienter leur économie vers les énergies renouvelables dans les années à venir, mais M. Forbes souligne que les perspectives du secteur pétrolier et gazier continueront de peser lourdement sur les perspectives budgétaires de ces provinces.
L'Ontario devrait également retrouver l'équilibre budgétaire d'ici la fin de la décennie. Le Conference Board indique que l'accélération des dépenses en infrastructures entraînera une hausse de la dette à court terme, mais que la modération prévue des dépenses en santé et en éducation favorisera l'élimination du déficit.
Difficultés au Québec et en Colombie-Britannique
Le Québec se trouve dans une «position difficile», indique le rapport, la province étant particulièrement affectée par une faible dynamique démographique, une incertitude économique accrue et une demande croissante de dépenses en santé et en éducation.
Le Conference Board affirme toutefois que le Québec pourrait retrouver un modeste excédent d'ici 2029 si la province parvient à maîtriser ses dépenses.
La Colombie-Britannique est également confrontée à un déficit important, selon le Conference Board, mais un ralentissement des dépenses et une hausse des redevances sur le gaz naturel devraient l'aider à sortir de ce gouffre financier au cours des prochaines années.
Le programme d'infrastructures du gouvernement fédéral pourrait également être une aubaine pour la province, souligne le rapport.
Pressions dans les Maritimes
Si le Nouveau-Brunswick est salué dans le rapport pour ses mesures de restriction budgétaire des dernières années, le Conference Board mentionne que le vieillissement de la population et l'exposition de l'industrie forestière aux droits de douane constituent de sérieux défis en matière de revenus.
La Nouvelle-Écosse devrait également faire face à des défis liés au ralentissement économique, notamment en raison du manque d'investissements du secteur privé et de l'activité immobilière qui pèsent sur la croissance.
Richard Forbes a indiqué que, même si les prévisions du Conference Board supposent une diminution de l'incertitude commerciale l'an prochain, la situation financière des provinces pourrait se détériorer davantage si le différend tarifaire entre le Canada et les États-Unis persiste.
L'un des avantages de l'exercice du Conference Board réside dans le fait qu'il soumet tous les plans budgétaires provinciaux à un scénario uniforme, a-t-il dit, contrairement aux diverses hypothèses qui sous-tendent le plan de dépenses de chaque province.
Craig Lord, La Presse Canadienne