Le dépistage de la scoliose présente des lacunes au Québec


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Par La Presse Canadienne, 2024
MONTRÉAL — Le dépistage de la scoliose chez les enfants présente des lacunes au Québec, déplore un spécialiste, ce qui signifie que plusieurs sont vus tellement tardivement que seule l'option chirurgicale est alors disponible.
«Il y a un rebond du nombre de patients, et les enfants se présentent trop tard», a résumé le docteur Jean Ouellet, qui est chirurgien orthopédiste à l’Hôpital de Montréal pour enfants.
La scoliose n'est plus dépistée dans les écoles du Québec depuis une quarantaine d'années, entre autres parce qu'on a longtemps cru que l'évolution de la maladie était irréversible.
On sait maintenant que c'est faux, a dit le docteur Ouellet: si le problème est détecté assez tôt et si des mesures correctives sont mises en place, trois enfants sur quatre échapperont au bistouri.
«Les études démontrent que si on fait un dépistage précoce et qu'on est capables de les embarquer dans un corset, on est capables de minimiser ce qu'on appelle le fardeau médical de la scoliose», a dit le docteur Ouellet.
C'est pour cette raison, poursuit-il, qu'a été créée une coalition pancanadienne, dont fait aussi partie l'Hôpital Sainte-Justine, afin de remettre sur les rails un programme de dépistage, surtout lors de la poussée de croissance des jeunes.
Car c'est à ce moment, a souligné le docteur Ouellet, que le problème pourra s'aggraver au point de devenir évident aux yeux de néophytes comme les parents, les professeurs ou les entraîneurs. Il commence alors, malheureusement, à se faire très, très tard.
«Il faut augmenter la sensibilisation au problème, a-t-il dit. Surtout que les enfants ne suivent pas tous (le même chemin), il y en a qui ont des poussées de croissance plus tôt ou plus tard. Et pendant les poussées de croissance, les choses peuvent changer assez rapidement.»
Les parents sont donc invités à garder l'œil ouvert «quand les pantalons (des enfants) deviennent de plus en plus courts et qu'il y a une sorte d'accélération», a précisé le docteur Ouellet.
Le dépistage était à une certaine époque effectué par les infirmières qu'on retrouvait dans pratiquement toutes les écoles du Québec.
Mais aujourd'hui, si l'enfant est apparemment en santé, il ne sera que très rarement vu par un médecin. Cela est d'autant plus vrai dans le contexte actuel bien connu du système de santé, où même ceux qui ont besoin de consulter peinent à le faire.
«Environ 40 % des patients qu'on voit n'ont pas de scoliose, a dit le docteur Ouellet. Mais pour 30 % de ceux qu'on voit, il est déjà trop tard et on peut seulement leur offrir une chirurgie. Donc on est inondés de patients qui n'ont pas réellement une scoliose, pendant que les patients qui ont un besoin aigu ne sont pas vus. J'aime mieux voir plus de patients et les rassurer, mais il faut trouver un juste milieu.»
Et même si l'enfant est vu par un professionnel de la santé, certains «disent "on va attendre que tu aies fini de grandir", mais c'est trop tard», a déploré le docteur Ouellet.
«Il faut réellement attraper ça au début, initier des corsets très tôt, pour être capables de changer l'histoire naturelle de la scoliose», a-t-il dit.
Jean-Benoit Legault, La Presse Canadienne